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24 novembre 2018 6 24 /11 /novembre /2018 21:19

L’art contre la culture

 

Si l’art reçoit son nom, il est perdu. Sa reconnaissance comme « Art » par les institutions le prive de ce qui le rend vivant. La totalité de l’art est ainsi bien plus vaste que ce que recouvre son nom, nom qui induit même en erreur sur sa nature :

 

« Le vrai art il est toujours là où on ne l’attend pas. Là où personne ne pense à lui ni ne prononce son nom. L’art il déteste être reconnu et salué par son nom. Il se sauve aussitôt. L’art est un personnage passionnément épris d’incognito. Sitôt qu’on le décèle, que quelqu’un le montre du doigt, alors il se sauve en laissant à sa place un figurant lauré qui porte sur son dos une grande pancarte où c’est marqué ART, que tout le monde asperge aussitôt de champagne et que les conférenciers promènent de ville en ville avec un anneau dans le nez. C’est le faux monsieur Art celui-là. C’est celui que le public connaît, vu que c’est lui qui a le laurier et la pancarte. Le vrai monsieur Art pas de danger qu’il aille se flanquer des pancartes ! Alors personne ne le reconnaît. Il se promène partout, tout le monde l’a rencontré sur son chemin et le bouscule vingt fois par jour à tous les tournants de rues, mais pas un qui ait l’idée que ça pourrait être lui monsieur Art lui-même dont on dit tant de bien. Parce qu’il n’en a pas du tout l’air. Vous comprenez, c’est le faux monsieur Art qui a le plus l’air d’être le vrai et c’est le vrai qui n’en a pas l’air ! Ça fait qu’on se trompe ! Beaucoup se trompent ! [1] »

 

Le discours inverse la réalité dont il parle. C’est là le « poison de la culture[2] ». Le faux art, qui, remarquons-le, a pu être du vrai art avant de s’être trouvé épinglé comme un papillon, est le seul qui reçoit le nom « art ». Ainsi se trouve nié un nombre considérable de pratiques qui constituent pourtant l’art véritable, c’est-à-dire celui qui est encore vivant. C’est cette partie-là de l’art qui semble pouvoir échapper à la culture et même la combattre. Reste à savoir comment.

En attendant la fondation d’« instituts de déculturation » qui seraient des « sortes de gymnases nihilistes où seraient délivrés, par des moniteurs spécialement lucides, un enseignement de déconditionnement et de démystification étendu sur plusieurs années[3] », la réponse semble être pour Dubuffet d’étendre la logique de désenclosion qui caractérise ses écrits au-delà de ceux-ci[4]. Prendre conscience que la culture segmente notre pensée, et lutter contre ce fait par les idées, ne suffit pas, il faut aussi rétablir de la continuité dans la pratique même. En art, le moyen de le faire est de rendre le plus possible actifs ceux qui habituellement sont réduits au statut d’admirateurs passifs. Il faut pour cela les faire passer de la contemplation à la production, dans une logique inverse à celle des musées et des autres lieux d’exposition dont on a vu qu’ils ne sont pas faits dans l’idée que le peuple puisse « s’adonner à son tour à la création[5] ». Dans le même mouvement, il faut mettre à bas les hiérarchies qui permettent de valider un ensemble de productions et de styles plutôt que d’autres et de soutenir une classe d’artistes professionnels, seuls reconnus comme pouvant produire de l’art. La promotion de l’art brut remplit en partie ce programme puisque celui-ci est constitué de types variés, hors des conventions et des normes de la culture, ce qui déjà permet de remettre en cause l’aspect réducteur et limité de celles-ci, mais aussi parce que ces formes diverses sont produites par des êtres marginalisés et décrits par la culture comme incapables et inutiles pour la société. Le fait de donner une visibilité à l’art brut[6] et de décréter, unilatéralement, la dignité de celui-ci rend accessible la culture à tous et montre que la pratique de l’art ne dépend pas de la maîtrise préalable de la culture institutionnelle, mais est possible pour chacun :

 

« Nous entendons par là [l’Art Brut, NDR] des ouvrages exécutés par des personnes indemnes de culture artistiques, dans lesquels donc le mimétisme, contrairement à ce qui se passe chez les intellectuels, ait peu on [sic] pas de part, de sorte que leurs auteurs y tirent tout (sujet, choix des matériaux mis en œuvre, moyens de transposition, rythme, façons d’écriture, etc.) de leur propre fond et non pas des poncifs de l’art classique ou de l’art à la mode. Nous y assistons à l’opération artistique toute pure, brute, réinventée dans l’entier dans toutes ses phases par son auteur, à partir seulement de ses propres impulsions. De l’art donc où se manifeste la seule fonction de l’invention, et non celles, constantes dans l’art culturel, du caméléon et du singe.[7] »

 

L’effet de cette remise en action par l’art sans condition de culture préalable est de rompre avec le mimétisme culturel dont nous avons précédemment parlé. Il faut ici comprendre ce que signifie pour Dubuffet de rompre avec le mimétisme culturel. Il ne s’agit pas de produire des œuvres originales au sens où l’originalité se trouverait dans leurs comparaisons par rapport à une série antérieure de références présentes dans la culture (et donc dans un jugement émis à partir de ces références). L’originalité pratiquée ainsi ne peut que produire un nouveau mimétisme, une nouvelle convention toute aussi réductrice que celle qu’elle supplante et engendrer un cycle infini d’originalités se transformant en académismes générant eux-mêmes de nouvelles originalités qui s’opposeront ensuite à eux :

 

« il [l’académisme, NDR] a fait peau neuve ; il s’est transporté dans de nouveaux réseaux à forme toute nouvelle où beaucoup ne le reconnaissent plus, le prennent en toute bonne foi pour l’éclatante lumière. Il a pris un visage moderniste, professe l’avant-garde, joue les turbulents, les séditieux.[8] »

 

Si originalité il y a, ou invention ou création (autant de termes présents chez Dubuffet), ce ne peut donc être que dans le rapport au sujet qui produit, que comme « sécrétion » issue d’une origine individuelle. Cette originalité-là n’a pas besoin de se distinguer dans son résultat, n’a pas besoin d’être reconnue comme telle pour l’être et les œuvres pourraient même toutes se ressembler entre elles sans pour autant perdre leur caractère singulier. Le but est de produire un art venu de son propre fond et non de se positionner par rapport à des normes, quand bien même seraient-elles inévitablement présentes comme on l’a vu :

 

« C’est une notion [l’authenticité, NDR] dénuée de tout fondement. Tout artiste fait œuvre authentique dès lors qu’il s’emploie à ce qu’il souhaite avoir fait, ce qu’il aspire à voir.   Et c’est bien sûr le cas de tout un. Après cela, ce qu’il aspire à avoir fait résulte-t-il de sa seule impulsion spontanée ou bien d’incidences dans lesquelles interviennent le mimétisme, des influences ? Personne ne tranchera de la part de tels phénomènes dans les composantes qui sont à l’origine d’une personnalité. C’est au point qu’on est fondé à se demander s’il resterait quoi que ce soit en propre une fois éliminées toutes ces interventions.[9] »

 

Malgré ces doutes (bien légitimes), s’ouvre ainsi la possibilité d’abattre les hiérarchies culturelles puisque celles-ci ne peuvent procéder que du jugement[10]. Si la contemplation perd sa préséance sur la production, il est possible d’en finir avec un art servant d’instrument de domination. Dans une telle hypothèse, perdant la possibilité d’émettre des jugements de valeur : « le corps culturel, perdant par là son arme, n’aura plus auprès du public aucune autorité, ni donc sur les artistes aucune prise ; par où ceux-ci seront délivrés de sa tutelle et surtout de l’effet d’intimidation qu’exerce sur la liberté de leur production la mythique, la fallacieuse notion de valeur.[11] » Les conceptions de Dubuffet aboutissent ainsi à un art, à des pratiques artistiques plutôt, multiples, mouvantes, atomisées. De l’art sans sanction, sans norme légitimatrice se fondant non sur les mécanismes sociaux de reconnaissance, mais sur la volonté ou les besoins des auteurs.

Un second élément permet de combattre la culture, et la combat même naturellement : la matière, c’est-à-dire au fond la réalité elle-même. Dans sa correspondance avec Witold Gombrovicz, Jean Dubuffet la définit comme ce qui « se montre à ce qui nous résiste et nous cause douleur ; car il n’y a de réalité, il n’y a de faits et d’existence, qu’au moment des conflits.[12] » Nous retrouvons ici le goût de notre peintre pour le conflit et une certaine cohérence avec ce que nous avons vu précédemment : la réalité, continue, dynamique et infinie, est irréductible à la pensée culturelle qui veut la segmenter et la classer, elle ne peut que lui résister. Remarquons que la réalité n’est pas accessible tout le temps, elle ne « se montre » que lors du conflit avec elle, le reste du temps, s’accordant à notre vision du monde, ou du moins ne s’y opposant pas, nous l’oublions par confort et habitude.

Aussi pour Dubuffet la réalité, comme matière doit-elle être l’impulsion qui engendre l’art. Parlant de sa pratique, il dit :

 

« Le point de départ est la surface à animer – toile ou feuille de papier – et la première tache de couleur ou d’encre qu’on y jette : l’effet qui en résulte, l’aventure qui en résulte. C’est cette tache, à mesure qu’on l’enrichit et qu’on l’oriente, qui doit conduire le travail. Un tableau ne s’édifie pas comme une maison, partant de cotes d’architectes, mais : dos tourné au résultat – à tâtons ! à reculons ![13] »

 

L’art anti-culturel est ainsi un art non conceptuel. Il n’est pas l’actualisation d’un projet dans la matière. Jean Dubuffet rompt ici avec les traditions néoplatonistes apparues lors de la Renaissance, celles qui font dire à Léonard de Vinci, par exemple, que la peinture est chose mentale, et qui ont durablement nourri, de façon sous-jacente, l’histoire de l’art les siècles suivants[14]. Au contraire, c’est « l’autorité de la chose existante » qui conduit « les impulsions de la pensée » au point que l’artiste se voit contraint de suivre la logique de la matière qu’il a « le sentiment que ce ne pourrait être arrangé autrement[15] ». Dubuffet conclut ainsi :

 

« Je crois très important pour un artiste qu’il s’exerce à aligner sa pensée sur ce qu’il a fait, au lieu de s’entêter à aligner son ouvrage sur ce qu’il a en pensée. […] Plutôt que modifier l’œuvre, modifier le regard. C’est en s’entraînant à modifier le regard qu’on obtiendra de nouvelles vues sur les choses.[16] »

 

Dubuffet nous livre ici l’une des clefs qui nous permettent de comprendre comment l’art peut échapper à la culture. Nous avions déjà vu que la peinture comme langage à significations flottantes ouvrait cette possibilité. Nous comprenons désormais mieux la nécessité de la pratique même des arts. En procédant par improvisation, il est possible de rabattre la conscience sur le flux de la vie réelle et de mettre en suspend l’interprétation culturelle de la réalité. L’art est alors affaire de réactions, d’adaptations successives et spontanées aux accidents de la matière. Ici, Dubuffet retrouve les tentatives surréalistes qui visent à tirer parti de l’imprévu pour renouveler les formes artistiques et en inventer de nouvelles, au sens premier du terme (frottage chez max Ernst, méthode paranoïa-critique chez Dali, dessin automatique chez André Masson, fumage chez Wolfgang Paalen, Décalcomanie chez Oscar Domingez, etc.). Les idées ne nourrissant pas l’art[17], il s’agit pour Dubuffet de se discipliner (« s’exercer à aligner sa pensée ») à substituer au conditionnement culturel, un conditionnement par la matière : « La spiritualité doit emprunter le langage du matériau. Chaque matériau a son langage, est un langage. Il ne s’agit pas de lui adjoindre un langage ou bien de la faire servir un langage.[18] » Cette substitution ne peut bien sûr qu’être temporaire, ne durer que quelques « instants fugaces » s’étendant au maximum à la durée de la pratique elle-même. Mais, c’est suffisant pour bousculer les habitudes culturelles et démarrer un processus de « déculturation » dont on comprend qu’il sera long, exigeant et à jamais inabouti.

Dans cette philosophie du conflit et des heurts, deux pôles semblent donc pour Dubuffet rendre possible la résistance à la culture : le moi et le réel. Tous deux lui semblent irréductibles. Au fond, c’est assez logique, la culture telle qu’elle a été décrite joue un rôle de médiation entre ces deux pôles, médiation trompeuse bien entendu comme on l’a vu. Se libérer de la culture ne peut, selon cette logique, que consister à court-circuiter cette médiation, à faire dialoguer directement l’individu et le monde, par l’intermédiaire donc de la matière brute, des perceptions et réactions qu’elle engendre[19]. C’est à parti de là que peuvent apparaître de nouvelles façons de voir et de penser. En cela, l’art anti-culturel ne risque pas d’être une nouvelle nomenclature qui remplacerait la précédente (comme le font les œuvres modernistes) à la condition qu’il demeure constamment attentif au réel et revienne toujours vers lui. Impossible cependant pour l’artiste de se laisser aller sans se faire prendre aux pièges qu’il aura lui-même conçu.

 

[1] Idem. Ajoutons : « La vraie création ne prend pas souci d’être ou de n’être pas de l’art. Je croirais même bien qu’elle se trouve viciée dès que ce mot d’art est à son sujet prononcé. » Bâtons rompus, p.29.

[2] « Cette étreinte [du conditionnement culturel, NDR] en effet ne lâchera prise que lorsque la notion d’art, et non pas seulement de tableau, aura cessé d’être conçue et perçue, lorsque l’art, cessant d’être projeté par la pensée devant le regard en tant que notion, sera intégré, en telle forme que la pensée, au lieu de lui faire face, sera dedans ; à partir de quoi il cessera de faire partie des choses susceptibles de recevoir un nom. Ce n’est pas à proprement parler l’art qui constitue le poison de la culture, mais c’est son nom. » Asphyxiante culture, p.76-77. Il y a donc dissociation entre la pratique de l’art et sa dénomination, Dubuffet est artiste tout de même : « L’esprit devra s’exercer à prendre conscience – et la garder bien permanente – de l’énorme différence de nature qu’il y a, s’agissant de l’art comme de toute chose qui soi, entre la chose et la notion de la chose. » Idem. L’art n’a ainsi pas besoin de la culture, il perdure sans elle et vit même mieux même sans elle car il devient une activité accessible à tous sans hiérarchie (tout en perdant son nom). Ce refus de la dénomination « art » est très présente dans la seconde moitié du XXe siècle. Nombre d’artistes en refusent l’usage et produisent ce qu’ils nomment des « travaux », des « pièces », des « propositions », du « non-art », de l’« anti-art », etc.

[3] Asphyxiante culture, p.115. À la suite : « de manière à doter la nation d’un corps de négateurs solidement entraînés qui maintiennent vivante, au moins en de petits cercles isolés et exceptionnels, au milieu du grand déferlement général d’accord culturel, la protestation. »

[4] Sans doute faudrait-il dire l’inverse d’ailleurs, nous sommes, pour les besoins de cette étude, partis des textes, mais ceux-ci sont plutôt des actes réflexifs, postérieurs à une pratique qui leur a donné leur substance. L’art brut préféré aux arts culturels date de 1949, mais il n’est qu’embryonnaire, la plupart des textes analysés, plus développés, datent décennies qui suivent et même de la fin de sa vie pour Bâtons rompus. La pratique précède la réflexion.

[5] Asphyxiante culture, p.22.

[6] En le nommant, Dubuffet le fait rentrer dans le champ de la culture, ce qui pose problème. Pourquoi vouloir défendre l’art brut et le nommer « art » si cela ne peut que le tuer ? Vouloir légitimiter, c’est légitimer ce qui légitime. Mais, peut-être l’intention est-elle simplement de donner une visibilité à l’exercice démocratique de l’art par l’exemple ? « Art brut » a tout d’un oxymore, une idée paradoxale, ce faisant cette dénomination échappe peut-être en partie aux effets de la culture aux yeux de Dubuffet.

[7] L’art brut préféré aux arts culturels, sans pagination.

[8] Ibid., p.84. Et à la suite : « C’est trop facile de discerner l’académisme cinquante ans plus tard sans discerner cependant celui du moment présent. C’est justement ce que faisaient ceux d’il y a cinquante ans alors que ces vieillards dont nous rions aujourd’hui étaient dans la fleur de l’âge. Ils se tenaient eux-mêmes à ce moment plus fort lucides, éclectiques et ouverts à toutes nouvelles doctrines (qui leur paraissaient, du moins telles) et beaucoup les tenaient aussi pour tout cela. Leurs homologues sont revenus ; ils sont maintenant là de nouveau pleins de jeunesse, jouant les éclairés, passant pour tels. » De même, p.106 : « La position de subversion cesse bien sûr s’il advient qu’elle se généralise pour devenir à la fin la norme. Elle s’inverse à ce moment de subversive en statutaire. »

[9] Bâtons rompus, p.49-50.

[10] En témoigne ce dialogue dans Notes pour les fins lettrés : « Ceci n’est pas de la peinture ! C’est un tracé que vous avez dessiné avec votre talon. – Et cela ? – Pas davantage, vous voyez bien, c’est mou, c’est plutôt un rideau, une tapisserie […] J’ai besoin d’ouvrages comparables entre eux, et que je puisse ensuite classer par ordre de mérite, à l’intérieur d’une catégorie bien définie. – Et ensuite ? – Et bien, je distribue les prix, et c’est fini, on y voit clair » Op.cit., p.21-22. La catégorie suppose l’essence, la correspondance plus ou moins grande à celle-ci détermine la hiérarchie. Ou encore : « On appelle doué pour le dessin un qui montre de l’aptitude à dessiner dans le mode que la culture du moment impose » Asphyxiante culture, p.119.

[11] Ibid., p.83.

[12] Correspondance, p.63.

[13] Notes pour les fins lettrés, op.cit., p.121. De même en ce qui concerne ses assemblages (comme les Théâtres de mémoire) : « ils sont tout à fait improvisés lors de l’exécution. Un assemblage vient d’un autre. Si dans le dernier fait des effets m’intéressent, ils sont le point de départ du nouveau. […] Je peux bien avoir en vue, en effet, quelque chose, mais de façon extrêmement vague et presque toujours ce se trouve changé en cours d’opération. » Bâtons rompus, p.10-11.

[14] Dubuffet retrouve ici Alain, qui déclare que l’artiste est d’abord artisan : « Pensons maintenant au travail du peintre de portrait ; il est clair qu'il ne peut avoir le projet de routes les couleurs qu’il emploiera à l’œuvre qu’il commence ; l’idée lui vient à mesure qu’il fait ; il serait même plus rigoureux de dire que l’idée lui vient ensuite, comme au spectateur, et qu’il est spectateur aussi de son œuvre en train de naître. Et c’est là le propre de l’artiste. » Alain, Système des beaux-arts, Livre I, chapitre VII, NRF-Gallimard, coll. « Tel », 1953, p.38.

[15] Bâtons rompus, p.11.

[16] Idem. Et plus loin : « L’art doit naître du matériau et de l’outil et doit garde la trace de l’outil et de la lutte de l’outil avec le matériau. L’homme doit parler mais l’outil et le matériau aussi ».

[17] « Ça n’est pas d’idée que se nourrit l’art » L’art brut préféré aux arts culturels, sans pagination.

[18] Notes pour les fins lettrés, op.cit., p.26. Ajoutons ce passage : « À l’arrière-plan, il y avait le désir de prêter à la pensée (la pensée du peintre traçant son image) la langue parlée par la matière, obliger la pensée à faire cette langue sienne. » Bâtons rompus, p.13.

[19] Dubuffet s’y emploie dans son travail même : « Je mise beaucoup sur les improvisations rapides où la délibération n’a pas eu le temps d’intervenir. L’intervention, je m’en méfie, parce qu’elle a toute chance de procéder du conditionnement culturel, d’un mécanisme rationalisant qui s’en vient dénaturer les trouvailles et les éteindre. » Bâtons rompus, p.25.

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