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15 avril 2013 1 15 /04 /avril /2013 22:58

            Le texte publié ci-dessous correspond au propos que j'ai tenu lors de mon intervention le 23 octobre 2012 dans l'auditorium du Forum des Arts & de la Culture de Talence, dans le cadre du colloque intitulé : Vertige de la lumière (cf. : http://associationfrictions.wordpress.com/2012/10/15/colloque-vertige-de-la-lumiere/ ). Il s'agit d'une analyse de 3" de Marc-Antoine Mathieu publié l'année précédente.

 

-Partie 1

 

-Partie 2

 

-Partie 3

 

-Partie 4

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15 avril 2013 1 15 /04 /avril /2013 22:56

Devenir enquêteur

 

3" est donc une expérience particulière du point de vue : celui d’une entité unique et omnisciente, sorte de lumière du savoir divin, dépassant les possibilités humaines, traversant les espaces en laissant les signes à décrypter derrière elle. Mais nous récepteur de ce dispositif, nous ne sommes que des hommes. Il nous faut donc reprendre les images que nous avons vues, cette fois pour les lire et les interpréter.

Pour cela, il nous faudra les regarder différemment. En effet, lors de notre première expérience, pris par le vertige de cette plongée dans des images emboitées les unes dans les autres, nous n’avons naturellement pas porté attention à ces indices. Notre attente était celle qui nous est habituelle face à une bande dessinée : que va-t-il arriver ensuite ? Quelle sera la prochaine image ? Où ce rayon va-t-il nous conduire ? etc. Notre regard était donc principalement rivé sur le prochain reflet à venir, notre attente était sur l’horizon[1] et donc sur le centre des images, sur l’endroit où doit nécessairement apparaitre la suite de la trajectoire du rayon, puisque celui-ci est à la fois le point de vue central et le point de fuite vers lequel il se dirige.

Or, les informations utiles pour comprendre les événements qui nous sont présentés ne sont pas au centre des images, elles glissent presque immédiatement vers la lisière du cadre, là où nous ne regardons habituellement pas. Lorsqu’ils sont suffisamment gros pour être perçus, c’est là que notre regard est le plus en attente de la prochaine poupée russe et donc le moins disponible pour eux. Par leur positionnement en périphérie, ils nous échappent inévitablement à la première vision[2].

Il nous faut donc décentrer notre regard, quitter le vertige spectaculaire, qui bien que sublimement agréable ne peut que nous maintenir dans l’ignorance. Il faut sortir du temps linéaire pour rendre intelligible la situation[3]. Cette nécessité du décentrement est d’ailleurs indiquée par mise en abyme finale où le blanc de la lumière envahit le centre et où les derniers résidus d’image ne subsistent que sur les bords. Précédée par les mots nothing et something et se situant dans une happening gallery, l’illumination finale nous informe donc qu’il est arrivé quelque chose là où nous n’avions rien vu. Cette fin dit au lecteur : « ça y est tu as tous les éléments, même si tu ne les as pas vus. Maintenant, reviens sur tes pas et cherche l’explication que tu espérais trouver en venant jusqu’ici, jusqu’à la fin. »

Sachant que ces indices ne se présentent pas dans un ordre déterminé qui guiderait le lecteur d’étape en étape vers la solution, celui-ci se retrouve donc livré à lui-même, contraint de parcourir un espace de signes multiples qu’il va lui falloir démêler. Le lecteur/spectateur est donc dans la même position qu’un enquêteur devant une scène de crime (ce qu’est en effet 3" puisqu’il s’agit, rappelons-le, d’une tentative de meurtre[4]). Il lui faut donc recomposer les causes qui amènent au crime. Le lecteur doit ici résonner par abduction, partir d’une situation et de ses composantes pour formuler des hypothèses d’explication correspondant aux indices que l’on possède. Peu à peu, en faisant des allers et retours entre les pages, entre les indices et ses hypothèses, l’enquêteur reconstitue le puzzle du récit. Nous sommes, devant 3", dans la même position que le photographe de Blow Up, il nous faut plonger dans l’abyme des images et de leurs détails pour comprendre. [5]

Ainsi, Marc-Antoine Mathieu transforme le lecteur en enquêteur, lui livrant tous les éléments, mais de façon dispersée, pour comprendre cette histoire. Ce puzzle nous n’en dévoilerons pas la solution ici, ce n’est pas notre objet. Nous ne voulons pas vous priver de l’expérience particulière que constitue 3", nous en avons même déjà peut-être un peu trop dit. Si vous voulez la lumière, il vous faudra la chercher par vous-même en parcourant ces mystérieuses trois secondes.



[1] Pour jouer avec l’expression bien connue de Hans Robert Jauss, car ici il y a un jeu sur l’horizon d’attente du lecteur, qui scrute l’horizon des images, qui est habituellement aussi l’horizon du récit, horizon d’attente qu’il lui faut modifier en oubliant ses réflexes normaux de lecture.

[2] Le phénomène est encore plus net dans la version animée ou les objets nous fuient littéralement à peine apparus. La continuité du temps accentuant l’impression qu’ils glissent hors de notre portée en s’élançant vers le hors champ.

[3] Il nous faut en quelque sorte sortir de la caverne de Platon et de ses lumières multiples et trompeuses pour atteindre à la vraie lumière, unique celle-là comme notre rayon dans 3", celle du soleil, de l’intelligible. La connaissance dans 3" semble donc être envisagée comme accessible à condition d’échapper au temps du sensible, aux phénomènes visibles mais éphémères, pour un temps hors de l’écoulement qui est celui de la raison. Les nombreuses occurrences de représentations d’yeux, ou d’objets équivalents comme les objectifs de caméra, qui voient tout, mais ne saisissent rien, car limités à un point de vue, appuient cette idée, tout comme la présence presque subliminale du cerveau qui, par sa structure labyrinthique, est apte à dénouer cet emmêlement linéaire.

[4] Qui d’ailleurs recycle bon nombre d’éléments typiques, presque clichés, du film noir. Sans en dire trop sur l’intrigue : ombres prédominantes, complot, faciès caricatural des comploteurs, femme traitresse, sniper sur le toit, grade du corps, mallette à menottes, etc.

[5] À cela s’ajoute aussi le jeu avec les reflets qui engendre des mots inversés, résonnants avec cette lecture à rebours que nous avons décrite. Notons que le film d’Antonioni trouve une résonance dans un autre album de Marc-Antoine Mathieu dont nous avons parlé : Le Dessin. Le héros de celui-ci explore le dessin qui lui a été légué de façon similaire à ce qui se passe dans la fameuse scène de Blow Up, tous deux utilisant des outils pour suppléer les limites de leur vision.

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15 avril 2013 1 15 /04 /avril /2013 22:54

Un espace (des)uni

 

Comme le temps, l’espace de 3" semble d’abord marqué du sceau de la continuité. À l’unité de temps s’ajoute donc une unité de lieu, celui traversé par le rayon de lumière, celui sillonné en tout sens, reflet après reflet, par le point de vue unique qui structure l’album et la vidéo. Dans les deux cas, cette continuité se produit par engendrement ; chaque nouvel espace est contenu par le précédent, chaque lieu contient en lui le suivant. Ainsi, l’espace est comme le miroir de sa temporalité : l’espace dans la réception est unifié et linéaire, l’espace diégétique est quant à lui fragmenté et multiple[1].

3" est structuré comme une panoplie de poupées russes, chacune d’entre elles s’accolant à la précédente en une plongée vertigineuse vers la clarté. Tout commence en effet dans l’obscurité, dans le noir le plus total, un chaos originel obscur, avant, bien sûr, que la lumière ne soit. Car suite à ce néant apparait un point qui grandit jusqu’à envahir le cadre, point qui se transmute en un petit univers que l’on va ensuite parcourir. C’est donc à un big bang en miniature que l’on assiste et celui-ci se poursuit, comme son modèle, jusqu’à l’infini. Le voyage qui commence ne se termine effectivement pas vraiment, puisque 3" s’achève entre deux miroirs qui, se reflétant l’un l’autre, conduisent le lecteur/spectateur dans un abyme de lumière.

De la nuit au jour, de l’obscurité à la clarté, trajectoire symbolique du caractère révélateur de la lumière dans ce récit. Au début, le lecteur ne sait rien et ne comprend pas la situation – pourquoi ce coup de feu ? – et puis peu à peu, en cherchant des réponses, la lumière se fait. Lumière et connaissance sont ici associées, comme il est de coutume, mais l’abyme final a une autre fonction. C’est lui qui invite le lecteur ou le spectateur à faire machine arrière : cet enfermement dans les reflets nous signifie en effet qu’à partir de ce point il n’y aura plus de nouvelles informations, que nous sommes au bout de ce labyrinthe rectiligne.

C’est là en effet le paradoxe de ce dispositif qui est à la fois linéaire, comme un travelling de cinéma, et morcelé, par des rebonds multiples sur des surfaces réfléchissantes[2]. Ce paradoxe nous l’avons vu est visible tant sur le plan temporel que spatial, chacune des deux données étant en même temps unifiée et divisée. Ce paradoxe est la conséquence de ce choix du point de vue particulier, lui-même paradoxal.

En effet Marc-Antoine Mathieu a choisi comme contrainte de figurer par le point de vue de ce qui permet habituellement la figuration. Nous voyons à la place de ce qui ne peut pas voir, étant la cause de la vision et non la vision elle-même. Nous adoptons donc le regard de ce qui devrait être regardé. Qui plus est, ce point de vue a ceci de particulier, comme nous l’avons vu, d’être unique et multiple à la fois. En sillonnant l’espace à la vitesse de la lumière, et en arrêtant le temps devant lui, il est au même moment en chaque point, il accède à toutes les informations. Plus encore, sa trajectoire, dépendante des multiples reflets qui sont autant d’accidents fortuits, devrait pour cette raison être hasardeuse, mais ne l’est pourtant pas puisque notre rayon va inévitablement vers ce qui est important, vers ce qu’il faut savoir pour éclairer la situation. Ce rayon de lumière semble donc, de manière très leibnizienne, choisir le meilleur des parcours possibles, allant systématiquement vers les indices nécessaires, sans s’égarer sur des détails insignifiants. Nous avons donc ici affaire à un point de vue quasiment omniscient, un regard divin et lumineux sur les événements[3].

Ce point de vue est donc objectif, dans le sens où il est neutre, impartial et complet[4]. Il faut aussi signaler qu’il ne fait preuve d’aucun jugement, d’aucune emphase particulière. Cette impression d’une observation clinique et d’une froideur émotionnelle est amplifiée par la mise en page, par l’équilibre symétrique et répétitif de ce quadrillage de cases identiques. Chaque page de l’album est un carré qui contient d’autres carrés de mêmes dimensions disposés selon une grille de trois cases sur trois[5]. Une fixité de la dimension des cases qui entraine donc un rythme régulier de lecture, sans rupture qui puisse mettre en avant un élément plus qu’un autre, rythme que l’on retrouve dans l’animation sous forme de zoom continu.

Ainsi, si le rayon de lumière est omniscient et montre tout ce qu’il faut savoir, il n’indique en même temps rien, ne met en exergue aucune information par rapport aux autres. Tous les indices sont présentés sur le même plan. Comme lecteur ou comme spectateur, nous avons donc tout vu, mais rien compris. Cela est tout à fait normal. Nous, nous ne sommes pas omniscients. Notre observation linéaire se révélant peu performante, il nous faut donc changer notre mode d’interaction avec ces objets : il nous faut revoir, parcourir de nouveau ces images, mais cette fois, nous l’avons déjà dit, en nous échappant du temps linéaire habituel. Le rôle du lecteur/spectateur change.



[1] Il n’est absolument pas étonnant de constater ce lien, cette réciproque entre espace et temps. La bande dessinée est en effet l’art de l’espace qui produit du temps et du temps qui se fait espace.

[2] Ce que l’on ressent d’ailleurs différemment selon que l’on fait l’expérience de 3" en vidéo ou en album. Le dispositif de la bande dessinée donne plus l’impression de ricocher sur les surfaces,  tandis qu’en vidéo, les espaces sont contenus les uns dans les autres de façon continue, sans rupture.

[3] Si Mathieu avait choisi situation banale pour sa contrainte alors son travail serait resté une simple expérience formelle. Mais, comme il s’agit d’un crime et d’un mystère, alors ce rayon de lumière est plus qu’un prétexte. Il aurait pu être le fruit du hasard, formant un parcours dans le monde quotidien comme un milliard d’autres auraient pu le faire. Il est ici  paré de symbolisme, tout comme l’album qui se fonde fortement sur le chiffre 3 : trois secondes, trois temps narratifs, trois fois trois cases par page, trente-trois miroirs, etc.

[4] Même si, bien entendu, le point de vue est subjectif à chacun des instants pris séparément (sinon il n’y aurait d'ailleurs pas de point de vue du tout). Ainsi, l’ensemble est objectif par accumulation de tous les points de vue et non dans le sens courant qui confond neutralité et privation, restriction. Ajoutons à cela qu’étant le point de vue d’un objet, il est nécessairement objectif, pour jouer sur les mots.

[5] Qui rappelle quelque peu les carrés magiques ou les grilles de sudoku. il y a bien dans cette disposition l’indication d’une énigme à élucider, d’un puzzle à résoudre pour comprendre l’ensemble du récit.

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15 avril 2013 1 15 /04 /avril /2013 22:53

Une temporalité (dis)continue

 

Il y a deux temps en bande dessinée : le temps diégétique, celui du récit, et le temps de la réception, celui du lecteur. Commençons donc par ce temps narratif, celui des événements qui se produisent, et qui donne son titre à l’album : un temps de trois secondes. Trois petites secondes, et donc une intrigue fortement condensée, une unité de temps stricte qui conditionne une quasi-unité d’action. En effet, si 3" ne raconte qu’un seul évènement, une tentative d’assassinat en l’occurrence, le récit quant à lui est scindé en deux phases : le coup de feu coïncidant avec le début, l’impact avec la fin. Les deux parties étant reliées par une troisième, sans enjeu narratif notable, une longue errance, un aller et retour entre la terre et la lune qui contient la majeure partie des trois secondes et qui sert de transition.

Il n’y a donc pas totalement unité, mais division en deux instants distincts. Un premier espace, une transition faite de vide puis un nouvel espace. Comme si Mathieu avait en fait réalisé une bande dessinée en deux cases séparées par un espace intericonique, à la différence près que ces deux cases se sont ici fragmentées en une multitude d’autres, une série de points de vue qui sillonnent chacune des deux situations.

Ceci étant, il n’y a pas que deux instants dans 3" ; d’autres temps s’infiltrent et se font voir au travers d’eux. Pour parler à la manière de Lessing, ces deux instants sont particulièrement féconds[1]. Ils contiennent en eux toute une série d’éléments qui sont autant de ramifications vers le temps qui se situe hors du récit. Tous ces indices nous conduisent vers les causes du coup de feu, les rôles des divers personnages, et vers les suites probables de celui-ci. L’intrigue est donc condensée à l’extrême sur son nœud principal[2]. Cet espace-temps fermement clos inclut donc en germe des traces qui le relient à une continuité ouverte, hors champ, qui n’est pas donnée au lecteur, mais que celui-ci doit reconstituer. Comme le rayon de lumière relie des espaces différents pour n’en former qu’un seul, le lecteur doit relier les informations pour comprendre la totalité qu’elles forment.

Car cette temporalité particulière du récit modifie aussi celle de sa réception. Qu’il s’agisse de l’album ou de l’animation, le lecteur/spectateur ne suit pas l’histoire de façon linéaire. Au contraire, pour saisir les tenants et les aboutissants de l’évènement, il lui faut aller d’avant en arrière, faire une série d’aller-retour entre les pages ou les moments de l’animation. Il faut donc faire des sauts pour trouver des indices qui permettront d’éclairer la signification des éléments qui leur sont complémentaires. Chaque signe ne se comprend donc pas dans une succession, mais dans une trame, un tissage qui se situe sous la linéarité apparente du dispositif.

Il a donc disjonction entre une très forte continuité, excessivement linéaire, visible notamment par la répétition et la régularité du format des cases, la mise en page sous forme de gaufrier, et la dispersion des informations qui nécessite de briser cette continuité pour pénétrer les mystères cachés. En somme, il faut briser le miroir, pour au travers des multiples reflets ainsi créés, avoir une vision complète. Le lecteur/spectateur doit donc ajuster sa manière habituelle d’appréhender un album ou une animation, il doit devenir acteur, jouer le jeu qui lui est proposé et non se contenter de suivre un chemin balisé comme il y est invité en général dans d’autres bandes dessinées.

Ainsi, en s’éloignant de la linéarité habituelle, à laquelle il est accoutumé, le lecteur/spectateur gagne un contrôle supplémentaire sur son interaction avec le récit, il lui est offert le choix de ce qu’il veut voir ou revoir[3]. Nous préciserons plus loin le nouveau statut, le rôle particulier qui échoit au lecteur dans 3".

Si nous devions trouver une explication diégétique à cette disjonction du temps objectif et du temps de la perception, nous pourrions invoquer tout simplement la distorsion que subit le temps à très grande vitesse. Un temps d’autant plus lent que le déplacement est rapide et que sa vitesse s’approche de celle de la lumière, vitesse qui est justement la nôtre, expliquant l’impression de se mouvoir dans un monde à l’arrêt, figé sur place. Rien d’étonnant donc que ces trois secondes pour les personnages apparaissent bien plus longues pour le lecteur qui les perçoit selon le point de vue du rayon de lumière. Ce ralentissement jusqu’à l’arrêt a donc pour conséquence de transformer le temps en espace. Il nous faut donc voir maintenant comment fonctionne cet espace et de quoi il est constitué.



[1] Gotthold Ephraïm Lessing, Laocoon ou des frontières respectives de la poésie et de la peinture, Paris, Hermann, 1990.

[2] Il y a là un parallèle à faire avec la tragédie classique qui en un épisode contient toute l’essence de l’existence de ces personnages en les condensant autour de l’événement fondamental de leur vie, le pivot de leur destin.

[3] Ce n’est donc plus seulement la nécessité aristotélicienne, diégétique, qui préside au récit et à ses évolutions, mais une autre nécessité, extra-diégétique, humaine, première, celle de savoir, celle de comprendre.

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15 avril 2013 1 15 /04 /avril /2013 22:38

Le texte publié ci-dessous correspond au propos que j'ai tenu lors de mon intervention le 23 octobre 2012 dans l'auditorium du Forum des Arts & de la Culture de Talence, dans le cadre du colloque intitulé : Vertige de la lumière (cf. : http://associationfrictions.wordpress.com/2012/10/15/colloque-vertige-de-la-lumiere/ ). Il s'agit d'une analyse de 3" de Marc-Antoine Mathieu publié l'année précédente.

 

 

 

Trois secondes, c’est la durée, diégétique, de l’œuvre double produite par Marc-Antoine Mathieu. Œuvre double, car accessible selon deux modalités : en tant qu’album de bande dessinée, d’une part, et sous la forme d’une animation, accessible sur internet (avec un code fourni dans l’album), d’autre part. les deux versions se caractérisent par une absence de dialogues, un mutisme dont la conséquence naturelle est que tout ce qui est à déchiffrer dans 3"[1] est d’ordre visuel. L’ensemble est dessiné en noir et blanc, ces deux valeurs étant les deux constituants d’un univers fait d’obscurité et de lumière, de zones d’ombres et de révélations. 3" c’est de la skiagraphia.

Ces deux expériences complémentaires nous donnent à voir le parcours d’un rai de lumière pendant trois secondes. Le point de vue qui nous est offert coïncide avec ce rayon, nous conduisant de reflets en reflets dans une traversée fragmentée de différents espaces : bureau, stade de football en plein match, avion, cabinet de dentiste, devanture d’une galerie d’art, l’espace interplanétaire jusqu’à la Lune, etc. Chacun de ces lieux contient des indices qui nous permettent de mieux saisir ce que nous avons vu et de comprendre l’ensemble du puzzle que nous devons recomposer (comme nous le demande d’ailleurs la quatrième de couverture). Le lecteur doit suivre la lumière pour clarifier les instants cruciaux de cette affaire aux ramifications multiples.

Marc-Antoine Mathieu nous propose donc ces deux expériences particulières engendrées par la contrainte de figurer par ce qui rend possible la figuration et d’observer par la source même de ce qui permet la vision. Pour utiliser un terme oubapien, Marc-Antoine Mathieu s’est doté ici d’une contrainte génératrice[2], un élément qui conditionne le développement de la bande dessinée et qui en influence la structure, en l’occurrence ici une restriction du point de vue. Notons que cette contrainte a aussi pour conséquence de donner son titre, particulièrement laconique, à l’ouvrage.

Cette volonté d’explorer les limites du médium bande dessinée, d’expérimenter ses possibilités, est une tendance lourde dans l’œuvre de Mathieu. À chaque album, il renouvèle son défi d’utiliser les données mêmes de la bande dessinée pour en faire la matière d’un album, 3" s’inscrit ainsi dans l’ensemble du travail d’un artiste préoccupé par le fonctionnement de la bande dessinée, conscient de ses possibilités et soucieux de jouer avec elles. Chez Mathieu, le médium est souvent sujet de lui-même, citons notamment l’album Le Dessin[3] qui, comme son nom l’indique, porte sur l’exploration abyssale d’un dessin et qui n’est pas sans échos avec l’album qui nous intéresse aujourd’hui. Évoquons aussi sa série emblématique Julius Corentin Acquefac qui met en scène son héros éponyme, employé au ministère de l’humour, qui se trouve constamment confronté aux bouleversements des codes de la bande dessinée dans laquelle il évolue.

            Nous nous proposons donc d’analyser ici les deux aspects principaux de 3" : sa temporalité et son espace. La bande dessinée est en effet un médium spatio-temporel dans lequel l’espace conditionne les éléments temporels comme la durée de lecture et le rythme (il en va de même en ce qui concerne l’animation, mais d’une manière différente). Ces deux données, temps et espace, sont intrinsèquement liées dans 3" par la contrainte choisie par Mathieu. Le rayon de lumière conditionne l’espace diégétique, fait de reflets multiples, traversé par lui et la vitesse extrême de la lumière conditionne le temps diégétique, nécessairement ralenti pour le lecteur (3 secondes représentant en effet la traversée de près de 900 000 km, ce qui est tout de même beaucoup pour si peu de temps). Enfin, après ces deux éléments, nous nous intéresserons au lecteur/spectateur, à son expérience et au rôle qu’il tient dans ce double dispositif.



[1] Marc-Antoine Mathieu, 3", Paris, Delcourt, 2011.

[2] L’un des deux types de contraintes, avec les contraintes transformatrices, qui servent à répartir les différentes expérimentations des divers participants à L’Oupus 2 (Collectif, Paris, L’Association, 2003).

[3] Marc-Antoine Mathieu, Le Dessin, Paris, Delcourt, 2001.

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6 février 2013 3 06 /02 /février /2013 23:21

Vous trouverez, en suivant le lien ci-dessous, la vidéo captée lors de mon intervention dans le cadre du colloque intitulé Les Dieux Cachés de la Science-Fiction Française et Francophone ayant eu lieu le 23 novembre 2012 à la M.S.H.A ( Maison des Sciences de l'Homme d'Aquitaine), Université Michel de Montaigne Bordeaux 3 :

 

http://webtv.u-bordeaux3.fr/sciences/planches-hexagonales-et-francophones-lau-dela-de-la-science-fiction-2

 

(Avec des fautes d'orthographes dans mon powerpoint en bonus !!!!!!!!)

 

 

 

Lien vers le programme du colloque :

 

http://clare.u-bordeaux3.fr/spip.php?article729

 

 

 

et vers les autres interventions, riches et variées, dont quelques unes sur la bande dessinée :

 

http://webtv.u-bordeaux3.fr/sciences?selected=19

 

 

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25 avril 2012 3 25 /04 /avril /2012 22:04

Le texte publié ci-dessous correspond au propos que j'ai tenu lors de mon intervention le 8 décembre 2011, dans le cadre de la 1ère journée d'étude des doctorants de C.L.A.R.E. (Université Bordeaux 3) intitulée : Aux Marges de la Langue - Première exploration périphérique des territoires de la parole, de l'écriture et de l'image (cf. : http://clare.u-bordeaux3.fr/spip.php?article732). L'ensemble des questionnements de cette journée portaient donc, de façon très large, sur les marges, tant de langues que de pratiques artistiques. Le sujet de ma thèse portant sur la bande dessinée, c'est tout naturellement que j'ai choisi de porter ma réflexion sur ce médium.

 

- Partie 1

 

- Partie 2

 

- Partie 3

 

- Partie 4

 

- Partie 5

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25 avril 2012 3 25 /04 /avril /2012 17:53

 

 

 

Vers un lecteur coproducteur

 

  « C’est le regardeur qui fait le tableau » disait Marcel Duchamp. Aussi, à son instar, dirons-nous que c’est le lecteur qui fait la bande dessinée et cela est encore plus vrai dans les expériences que nous avons rencontrées lors de cette approche des marges de la bande dessinée.

  Le rôle du lecteur est en effet accru dans ces expérimentations radicales. Il passe d’une attitude relativement passive, celle du lecteur justement, qui déchiffre le récit selon les conventions dont il a l’habitude, à une activité plus grande. Celle-ci se voit intensifiée par les écarts aux normes traditionnelles du médium, le lecteur est en effet obligé de réajuster son approche de la bande dessinée, d’assimiler les nouvelles règles pour pouvoir profiter de l’expérience qui lui est proposée. L’accent est mis davantage sur le mode de narration que sur le récit, sur la forme nouvelle que sur l’histoire racontée, qui peut même n’être plus qu’un simple prétexte.

  Cette activité, par la rupture avec la séquentialité linéaire et la planéité, transforme la bande dessinée. D'une part, elle investit et active des espaces nouveaux, des dimensions inutilisées, et d’autre part d’expérience narrative, elle devient ludique. Le lecteur ne suit plus une histoire, il intervient selon des règles du jeu (choisir ses cases, lancer les dés, etc.) qui lui sont proposées par l’auteur. Ainsi, le lecteur voit sa marge de manœuvre augmentée dans ces B.D. qui n’en sont plus tout à fait. Dans ces expérimentations marginales, l’espace est ouvert pour que le lecteur devienne coproducteur et non plus simple récepteur.

  Nous avons dit pour commencer que les marges étaient, dans un livre, un espace dévolu au lecteur, espace qu’il peut annoter, corner ou marquer. Par analogie, nous conclurons en disant que ces bandes dessinées produites dans les marges du langage habituel, à la limite des conventions du médium, sortent de leur territoire pour entrer sur celui dans lequel le lecteur peut intervenir et devenir en partie producteur de sa propre expérience esthétique.

 

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25 avril 2012 3 25 /04 /avril /2012 17:50

 

 

 

 

Au-delà de la planéité

 

  Il y a deux espaces dans toute bande dessinée. Le premier est plat, il contient l’espace du récit, la diégèse qui prend forme par de multiples images, et l’espace qui donne sa cohésion au récit, espace vide composé des marges et des inter-cases. Le second appartient à notre monde, c’est le volume de l’album, l’espace qu’il occupe quand il est ouvert, quand le lecteur tourne les pages. Un espace fictif, un espace matériel. S’approcher des marges du premier, voire les dépasser, entraine la bande dessinée et son lecteur dans le second. Nous avons vu que, dans La Cage, Martin Vaughn-James avait en quelque sorte déplacé les ellipses de la planéité des pages vers l’interstice qui les lie, vers leurs tranches, mais il est encore d’autres procédés qui poussent les bandes dessinées dans l’espace physique. Nous allons maintenant en étudier deux d’entre eux.

  Le premier exemple que nous allons examiner est l’œuvre de Gustave Verbeck, il s’agit des Upside Down publiés d’octobre 1903 à janvier 1905 dans le New York Herald à raison d’une planche par semaine. Chaque planche est divisée en six cases, mais l’histoire quant à elle est paradoxalement contée en douze vignettes. Cela est possible uniquement parce que chaque case est lue deux fois ; les Upside Down sont en effet des palindromes, après être parvenu à la dernière vignette de la page, il faut retourner celle-ci de haut en bas (mettre la page upside down) et relire toutes les cases dans l’ordre inverse.

  Le couple de héros, un homme et une fillette qui se déplacent côte à côte, intervertissent alors leurs rôles, le haut de l’un étant le bas de l’autre, les moustaches de l’homme se transformant en cheveux et inversement. Donc, pour lire l’histoire, le lecteur ne peut se contenter de regarder la page, il doit la manipuler et identifier de nouveau les personnages et les objets du décor.

  Par cette utilisation inhabituelle de l’espace, Verbeck modifie quelque peu l’interaction entre la B.D. et le lecteur. Le mouvement physique entraine un mouvement mental, une réinterprétation graphique. Plus encore que chez Lécroart, où les signes se couvraient de plusieurs significations selon le contexte, ils se substituent ici les uns aux autres et l’identité des personnages dépend du lecteur qui choisit de reconnaitre l’un ou l’autre, le contexte ne variant pas.

  Ce qui est mis en évidence dans ce cas c’est non seulement le caractère conventionnel des signes, mais aussi la nécessité pour le lecteur d’être guidé tout au long du récit en bande dessinée par des personnages clairement identifiables, dont les caractéristiques graphiques demeurent constantes[1]. En retrouvant, après avoir retourné la page, les mêmes figures, bien qu’elles soient inversées, nous prenons conscience du lien que nous créons avec ces personnages et nous voyons à quel point nous nous identifions à eux pour suivre l’histoire.

  Pour terminer notre cheminement au travers de ces exemples d’expérimentations intéressons-nous à un type très particulier de bande dessinée qui se dote de la troisième dimension et qui dépasse les limites de la bande dessinée en se faisant objet, et pour cause puisqu’elle est constituée de trois dés à six faces que le lecteur doit lancer pour former un gag. Dans cette œuvre de Anne Baraou et Vincent Sardon, nommée Coquetèle, chaque strip ainsi formé est une sorte de cadavre exquis aléatoire dont les vignettes et l’ordre de leur lecture sont fixés par l’indétermination du lancer.

  Le lecteur, qui devient aussi joueur et expérimentateur, ne se contente donc plus de tourner les pages et de lire, il manipule ces objets tridimensionnels que sont les dés et les jette pour découvrir une nouvelle itération. Les possibilités sont multiples et aucun joueur n’en cherchera probablement toutes les variations. Ce ne sont donc plus les gags qui importent. Ces petits récits ne sont plus au centre de la bande dessinée, ils laissent place au jeu, c’est le principe du jeu et l’attente du résultat qui capte l’attention de celui qui était auparavant uniquement lecteur[2]. La finalité d’une telle expérimentation n’est donc plus narrative comme c’est habituellement le cas en bande dessinée, mais ludique.

  De plus, il faut signaler que, dans des cas limites comme celui-ci, la bande dessinée sort de ses limites spatiales traditionnelles, tant sur le plan physique, en passant de deux dimensions à trois, que sur le plan de la nature du médium pour rejoindre les arts plastiques, en devenant volume et en rejoignant une des préoccupations qui travaille de plus en plus les arts : l’interactivité.

 



[1] Pensons, par exemple, à Tintin, à sa houppette inamovible, à son inusable pantalon de golf et à son visage rond et épuré.

[2] Également de Anne Baraou, et avec des visées similaires, citons DoMiPo, réalisé avec Killoffer en 2009, bande dessinée qui prend la forme de dominos, et le Scroubabble, avec Étienne Lécroart en 2005, inspiré du Scrabble, édités tous deux à l’Association.

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25 avril 2012 3 25 /04 /avril /2012 17:41

 

 

 

 

Séquentialité brisée

 

   Considérer la bande dessinée comme un assemblage d’image et de texte, c’est passer à côté de ce qu’elle est réellement, car textes et images ne sont que les outils pour mettre en œuvre le caractère séquentiel de ce médium. Une bande dessinée est un récit exprimé sous la forme d’une séquence d’images. En règle générale, cette séquence est linéaire. Elle se lit à la manière d’un texte, de la gauche vers la droite et de haut en bas, chaque case se présentant comme une sorte de mot (ou de groupe de mots) intégré à une phrase visuelle. Rompre cette séquentialité, c’est donc porter atteinte au récit et en perturber la réception.

   Prenons comme exemple Quatre-vingt-quinze[1] d’Étienne Lécroart, une planche fonctionnant selon le mode de la « plurilecturabilité ». Le lecteur a ici le choix des cases qu’il veut lire dans cette page organisée en gaufrier[2] de cinq cases de hauteur sur quatre cases de largeur ; chacune des cinq cases de gauche peut être le point de départ pour le lecteur qui a ensuite le choix parmi les trois cases contigües (à droite et en diagonale vers le haut ou le bas) pour continuer le gag. Ainsi, il y a en fait quatre-vingt-quinze possibilités différentes dans ces cinq strips superposés[3], soit quatre-vingt-quinze gags aux ressorts différents.

   Ce système a pour effet de rendre le lecteur actif. Celui-ci choisit son chemin et expérimente plusieurs solutions, plusieurs variations. Il se demande ce qu’il advient du gag qu’il vient de lire si l’on n’en change qu’une vignette, ou si d’un point de départ différent on arrive à la même ultime case.

   Il est d’ailleurs frappant de constater que les mêmes éléments, les mêmes signes, visuels ou textuels, changent de signification selon le chemin suivi. Un individu vu en silhouette et de trois-quarts dos, avec une forme indéfinissable derrière lui, peut, selon la case que l’on vient de lire, être soit un homme avec des lunettes de soleil devant une plante verte, ou bien le même personnage vêtu d’une tenue à plumes d’une girl de music-hall, ou enfin un extra-terrestre tenant un drôle de pistolet futuriste.

   En jouant ainsi avec la séquentialité, Lécroart met en évidence le caractère mouvant et ambigu des signes constituant une bande dessinée et l’importance du contexte qui les entoure[4]. Il oblige le lecteur à reconsidérer ce qu’il a identifié une première fois et à revenir plusieurs fois sur la même case pour permuter et superposer mentalement les différentes possibilités. Les récits possibles ne se séparent plus. Ils s’associent et deviennent mobiles. Ils continuent d’exister dans l’esprit du lecteur lorsqu’il change de séquence. La planche n’est donc plus l’incarnation d’une histoire, mais un éventail de possibilités narratives qui ne s’annulent pas les unes les autres, mais s’accumulent au contraire. Il n’y a plus de récit linéaire, mais un ensemble fragmenté, un patchwork de gags sans cesse recomposés. Le langage de la bande dessinée est perturbé, il s’enrichit d’une multiplicité de sens, plus ou moins fusionnés, et ce qui était fixé une fois pour toutes par convention – comme un type de forme particulière qui signifierait plante verte – devient indéterminé.

   Martin Vaughn-James, dans La Cage[5], travaille lui aussi la séquentialité, d’une autre manière toutefois. Ce n’est pas par accumulation de possibilités narratives, mais en évacuant les personnages du récit et en ne conservant qu’une case par page (par double page parfois) accompagnée d’un texte extérieur à celle-ci. Ainsi, pas de héros pour guider le lecteur comme c’est habituellement le cas, pas de personnage réceptacle auquel il est possible de s’identifier. Le lecteur se trouve livré à lui-même dans un ensemble discontinu, dont la linéarité est désunie, dont les images et les textes sont davantage séparés que reliés.

   Ajoutons que l’essentiel des informations données au lecteur sont, à l’instar du nouveau roman dont Vaughn-James s’inspire, d’une nature descriptive, factuelle et distanciée. Ce sont des fragments d’un univers instable, une série, plutôt qu’une séquence, d’images représentant les lieux de ce monde fictionnel. La structure labyrinthique de La Cage déjoue les tentatives d’interprétation et emprisonne le lecteur dans un réseau non-linéaire qu’il essaye d’assembler.

   Et c’est alors son activité mentale qui devient primordiale. Les ellipses entre chaque page devenant des abimes déroutants, c’est à lui d’emplir ces gouffres d’un sens qui ne lui est pas donné, ni même véritablement suggéré par l’auteur. Il n’est plus en train de lire une bande (dessinée) mais de contempler un espace, à la structure fortement architecturée, au travers d’un prisme constitué de multiples facettes. De plus, il n’y a pas de chronologie entre les images, les mêmes éléments apparaissant tour à tour fissurés, craquelés ou en parfait état, dans une temporalité sans cause ni effet. À charge pour le lecteur de donner une cohérence à cette vision fragmentée.

   Ainsi, le récit s’efface et ce qui est habituellement une séquence se mue en une série d’éléments juxtaposés. C’est en effet autour du récit que se structure, dans la plupart des cas, la séquence qui constitue une bande dessinée. Dans La Cage c’est un espace mental qui sert de fondation aux images. Cette rupture de la séquentialité et la nature essentiellement descriptive de La Cage peuvent même nous pousser à nous interroger sur l’appartenance de celle-ci au domaine de la bande dessinée. Comme les autres productions de l’auteur, elle est d’ailleurs nommée : roman visuel (viual novel) sur sa couverture. La Cage est en marge de la bande dessinée et en pousse le fonctionnement à ses limites. Ici, le récit laisse place à l’espace.

 



[1] Étienne Lécroart, Quatre-vingt-quinze, in BANG ! n°4, Luçon, Beaux Arts magazine et Casterman, octobre 2003.

[2] Un gaufrier est, dans le vocabulaire de la bande dessinée, un type de planche dans laquelle toutes les cases sont rectangulaires et identiques, et dont l’organisation de celles-ci rappelle la disposition des trous d’une gaufre.

[3] Voir aussi Blat & Moustiker ! dans « soixante-huit » strips en quatre du  même auteur, publié dans l’Oupus 2, op.cit.

[4] Notons le caractère virtuose et la précision d’orfèvre que nécessite un tel exercice. L’auteur est en effet contraint de porter attention à chaque élément de chaque case, selon plusieurs contextes superposés, pour qu’il ait une signification dans chacun de ceux-ci et afin de ne rompre aucune des lignes narratives potentielles.

[5] Martin Vaughn James, La Cage, Belgique, Les impressions nouvelles, 2002.

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